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Journal d'une affamée

16 juillet 2014

Ce soir j'ai mal

J'ai 26 ans et je suis malade...

Je ne souffre pas d'un cancer, je ne suis pas handicapée... pour tout vous dire si vous me voyez vous ne pouvez que penser que je vais bien.

Mon quotidien c'est la souffrance, pas la mienne celle des autres. C'es tellement mieux de pouvoir s'y consacrer, cela permet d'oublier la sienne.

Pourtant je pensais que j'allais bien...

J'en étais même sûre...

J'ai une vie magnifique. Un appartement, un compagnon qui m'aime plus que je ne pouvez un jour l'espèrer, j'ai un boulot... Un vrai métier dans lequel je me sens utile et vivante, j'ai de l'argent sur mon compte, des vêtements dans mon armoire, à manger dans mon frigo...

Si un jour vous avez parlé avec moi, sans doute m'avez vous dit "c'est agréable de voir une personne si souriante" alors je vous ai sans doute répondu "ma foi, j'ai des jambes pour marcher et des poumons pour respirer, je n'ai que de quoi sourire"

Or je crois bien que même mon compagnon ne voit pas à quel point je souffre... Je ne le voyais pas moi même de toutes façons...JUsqu'à ce soir... Jusqu'à ce soir où j'ai compris que oui, j'étais malade...Malade de la bouffe... Au fond, je pense que je le sais depuis toujours mais que j'ai toujours refusé de voir la vérité en face... Parce qu'il y avait des moments où ca allait mieux... Des moments où je reprennais le contrôle...

L'histoire est banale, un peu triste mais que voulez vous on ne réécrit pas le passé...

J'avais 7 ans la première fois que mon père a abusé de moi...Mais à 7 ans on ne connait pas ces choses là... Et quand on grandit et qu'on comprend, le reflet dans le miroir ne représente plus rien... Parce que je n'étais plus rien... J'étais juste sale... Ma mère cette brave bonne femme trop amoureuse ou trop conne avait préféré laissé passer sur avis médical (oui oui)... 

Qui vole un oeuf vole un boeuf

Et si on ne coupe pas la main du voleur il recommence...

C'est alors agée de 11 ans (et dejà réglée) que mon père est revenu à pas de loups dans ma chambre... Mon père ce militaire de carrière toujours en mer... Cette année là il avait enfin eu un poste à quai... Tous les soirs enfin on aurait une vie de famille, il serait à table avec nous...

Mais quand les lumières s'éteignaient...

Il n'y avait plus de famille... Pour lui du moins... Car si pendant un an je n'ai rien dit c'était justement parce que je pensais à ma famille...

Pendant un an mon cher père est venu me dire bonne nuit à sa manière....

Un an....

Et peut être est ce vraiment à cette époque que j'ai commencé à faire les placards... A les vider même...

C'est vrai ma mère me repetait sans cesse "si tu es grosse les hommes ne voudront pas de toi et te feront souffrir"... Faut croire qu'elle avait tort puisque mon père malgré tous mes bourrelets disgracieux qui se dessinaient sur mon corps, lui continuait à vouloir de moi...

Et puis un jour... ma mère a trouvé mon journal intime ...

Et puis un jour... mon père est allé en prison

Et puis un jour, ma mère m'a dit que mon père était l'homme de sa vie, qu'elle l'aimerait toujours et que "quand même ce n'était pas non plus un mauvais père..."

Et puis un jour, je l'ai hais

Et puis un jour je l'ai aimé

Et puis un jour, plus d'une décennie après j'ai rencontré un homme qui m'a dit que c'était pas une vie, que ma mère n'était pas une mère, que mon père était un pédophile et que je méritais mieux que ça...

Et puis un jour, j'en ai eu marre, j'ai compris qu'il avait raison... J'ai dit adieu au passé, j'ai cur être guéri et devenir enfin une femme

Je me sentis en sécurité pour la première fois de vie

J'ai fait un régime, j'ai accepté d'être une femme et d'être heureuse...

Le problême des vieux démons c'est qu'il ressurgissent dès qu'ils sentent la faille...

Alors quand je me sens vide... Je mange, jusqu'à sentir mon ventre se tendre et se tordre, je mange jusqu'à ce que je n'en puisse plus...Et après alors je me sens sale, ignoble horrible, dégoutée de moi... comme quand papa s'en allait et fermait la porte de ma chambre...

Biensur, tout se fait en cachette... comme une droguée pour son shoot, j'invente des excuses, je mens....

Mais quand ca va pas, je dois avoir ma dose...

Il parait que c'est le début de la guérison lorsqu'on reconnait être malade...Si seulement ça pouvait être vrai...

J'ai honte de moi

J'ai honte car tout ce que je fais n'est que destruction... Et si je ne me soigne pas je sais que je finirais par tout perdre... Mais alors quoi? Je vais voir mon compagnon et lui dis que je souffre, je convoque mes amis et je leur dis que je leur mens depuis toujours? Que non en fait ca ne va pas, que j'ai peur, j'ai peur de vivre et d'être heureuse, j'ai peur d'être belle j'ai peur d'aimer et d'être aimée, j'ai peur du vide, du néant de l'abandon...Quand je mange j'oublis tout ça... Quand je mange, j'oublis... Mais comme une drogue... Le plaisir de la montée n'est rien comparée à la douleur de la descente....

Aujourd'hui j'ai 26 ans, je suis malade et j'ai besoin d'aide....

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